Malédiction, titre avec humour l'article de Journal des Arts, illustré de la photo du crâne, datant de la fin du 18ième siècle, ramené du Mexique en Europe dans les années 1920 par Eugène Pépin dont la collection fut dispersée à Drouot en 1985. Pour la SVV Binoche, qui a vu le 12 septembre l’Office centrale de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC) saisir 76 objets archéologiques qu'elle s'apprêtait à vendre l'après-midi même, en association avec Pierre Bergé et Associés, l'affaire est évidemment lourde de conséquences : les objets, raflés à la demande du Mexique qui a fait appel à une convention internationale d’entraide entre États, représentaient les deux-tiers de la valeur escomptée de la vente, comme l'explique le Journal des Arts.
Service interministériel basé à Paris, l’Office centrale de lutte contre le trafic des biens culturels dépend de la direction centrale de la police judiciaire. Il compte trente personnes (moitié gendarmes, moitié policiers). Seul service de police à avoir une compétence nationale dans son domaine, l’OCBC est le bureau d’Interpol pour les biens culturels en France (patrimoine public et privé). Il a compétence pour les demandes d'origine et à destination de l'étranger. En théorie, la France ayant ratifié la convention de l’Unesco sur la protection du patrimoine mondial en 1997, tout objet identifié en France comme sorti illégalement de son pays d’origine après 1997 doit être restitué à ce pays.
Cette saisie confirme la pression exercée par les pays d'origine des civilisations pré-colombiennes à l'encontre des maisons de vente internationales et suit une plusieurs dossier similaires. Ainsi le 27 mai dernier, au matin l'OCBC était venu dans les locaux de la maison de vente parisienne Gaïa saisir une des plus belles pièces de la vente prévue l'après-midi : un masque anthropomorphe stylisé en pierre sculptée Tafi, originaire du nord-ouest de ce qui est maintenant l'Argentine, datant de 100 à 300 après J.-C. La pièce répertoriée en France depuis 1950, plusieurs fois exposée de manière publique, est à priori d'une provenance totalement légale. Citons l'article du toujours synthétique Journal des Art du 20 juin 2008 sur l'affaire : "Remarquée par plusieurs amateurs éclairés, cette pièce majeure de culture Tafi devait faire l’objet d’une préemption du Musée du quai Branly à Paris. Par ordonnance en référé en date du 26 mai, le président du tribunal de grande instance de Paris a débouté la République d’Argentine de toutes ses demandes en estimant que la provenance de ce masque s’avérait parfaitement régulière au regard des lois et conventions internationales et l’a condamné, en outre, à payer la somme de 2 500 euros au titre du remboursement des frais irrépétibles. N’ayant pas dit son dernier mot, l’Argentine a saisi les autorités françaises d’une demande d’entraide internationale par le truchement d’une commission rogatoire internationale qui a, en moins de 24 heures, abouti à la saisie de cet objet dans l’attente des conclusions de l’instruction." Du coup, la commissaire-priseur de la vente a mis aux enchères l'objet sur désignation (en son absence), sous réserve donc que l'enquête confirme la régularité de sa provenance. La masque a été adjugé à 150 000 Euros à un particulier.


masque en pierre sculptée Tafi