≈Le 9 avril 2007, la société d'archéologie commerciale Odyssey - toujours eux !- déposa auprès d'un Tribunal de Floride une demande pour une reconnue comme "sauveteur-propriétaire" (salvior-in-possession, le droit français parlerait d'inventeur) de l'épave "d'un navire de transport de passagers sous pavillon italien, gisant en environ 500 mètres de fond dans les eaux internationales de la Mediterranée à environ 65 miles au sud-est de la Sardaigne", selon le texte même de la plainte. Cette localisation restait floue, à dessein bien sûr, mais la compagnie ne cherchait sans doute pas à cacher l'identité du navire, puisque plus loin, le même document précise que le navire avait été coulé en 1915, et qu'Odyssey a remonté une "tasse à thé portant le logo de la Societe de Navigation A Bapore Italia". Car les deux précisions dévoilent en fait l'identité du navire...
L'affaire remonte à 1915, le samedi 6 novembre exactement : le SS Ancona, un paquebot qui faisait la ligne Naples-New York, chargé d'ancêtres de ce qui serait un jour les personnages des films de Martin Scorcese, faisait un arrêt au port de Messine en Sicile. Son chargement : des émigrants avant tout, mais aussi 83 passagers de première classe et 12 barils de pièces d'or. En s'éloignant du Cap Carbonara, son capitaine aperçut soudain dans l'eau une tourelle surmonté d'un drapeau, et fît forcer les feux, jusqu'à ce qu'un coup de semonce le fît stopper. Son arrêt n'empêcha le sous-marin allemand de couler le bateau à deux coups de canons, provoquant un massacre de civils sans précédent dans cette guerre mondiale qui venait de commencer.
Le New York Times a consacra ses gros titres quatre jours durant, publiant la liste des survivants . le monde découvrait une nouvelle facette du conflit, la guerre sous-marine : l'Italie venait de rejoindre la France et l'Angleterre face à l'Allemagne, qui contournait la suprématie navale des Alliés en lançant contre leurs navires ses sous-marins, les U-boat. Ceux-ci attaqueront sans distinction les vaisseaux de guerre, les cargos et les paquebots apparaissant et disparaissant aux quatre coins de la Méditerranée et de l'Atlantique.

La demande d'Odyssey que cite ce billet, accessible en ligne